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Cadrage des négociations conventionnelles : où sont les engagements ?

La lettre de cadrage du ministère de la Santé, datée du 12 décembre 2023, est enfin parvenue aux négociateurs, qui vont donc pouvoir se mettre autour de la table. 

Depuis des mois, les pharmaciens d’officine attendent l’ouverture des négociations entre l’Assurance Maladie et les syndicats, portant sur le volet économique de la convention signée en 2022. La lettre de cadrage du ministère de la Santé, datée du 12 décembre 2023, est enfin parvenue aux négociateurs, qui vont donc pouvoir se mettre autour de la table. Il était temps !
 

Une prise en compte insuffisante de l’urgence

 
Ce coup d’envoi est une bonne chose mais une si longue attente était-elle justifiée ? Le réseau officinal, qui craque moralement et économiquement (voir notre communiqué https://www.unpf.eu/actualites/actualites/mal-etre-cette-autre-crise-qui-ronge-les-pharmaciens), n’a plus de temps pour les atermoiements. Et le contenu de la lettre du ministre, s’il n’a rien d’inattendu sur le fond, inquiète quant à la prise en compte de l’urgence. Rappelons qu’un nombre record d’officines ont fermé en 2023 (236, en hausse par rapport aux années précédentes), faisant chuter l’effectif sous la barre symbolique des 20 000 pharmacies dans notre pays, alors qu’elles étaient 22 000 en 2014. La situation de nombreuses officines ne cesse de se dégrader, et pas seulement dans les territoires « fragiles ». Il importe au passage de définir au plus vite ces fameux territoires, selon des critères économiques pertinents et dynamiques, prenant en compte les officines en voie de fragilisation liée à des facteurs tels que : trésorerie en baisse, départ du dernier médecin, présence d’un seul titulaire âgé de plus de 65 ans… Est-il normal, dans ce contexte, que « la perspective de conserver une offre officinale de proximité sur l'ensemble du territoire », priorité des priorités, n’arrive qu’en fin de courrier ?
 

Il faut passer des injonctions aux actes

 
Dans le reste de la lettre, sous le voile des intentions louables et des louanges (la « confiance » accordée à la profession, etc.), prédomine la volonté évidente de réduire les coûts de santé et d’y mettre les pharmaciens à contribution. Ne prenons-nous pas déjà plus que notre part, notamment à travers la substitution, l’effort constant en faveur du bon usage, la vaccination et la prise en charge des petits maux évitant bien des passages aux urgences ? Ce n’est apparemment pas suffisant, les pharmaciens devront contribuer « à la régulation des volumes basée sur la pertinence des soins ». Ironie d’évoquer les volumes lorsque fondent déjà les stocks d’innombrables traitements en tension ou rupture. Contre les pénuries justement, à défaut de mesures vigoureuses, le ministre réactive la dispensation à l’unité qui n’a pourtant montré sa pertinence ni sur l’économie ni sur l’écologie (voir notre article https://www.unpf.eu/entretiens/dispensation-a-lunite-des-medicaments-une-mesure-inadequate2/) et pose, surtout en période de ruptures, des problèmes de pharmacovigilance. Quant à « améliorer le taux de pénétration des biosimilaires », nous ne cessons déjà d’y appeler. Mais sans élargir le répertoire, cette injonction est vaine.
 

Reconnaître l’« acte pharmaceutique »

 
Ce courrier aborde enfin mais timidement la rémunération des pharmaciens, pourtant centrale pour maintenir le réseau. Il faut selon le ministre poursuivre la « désensibilisation de la rémunération des pharmaciens aux prix des médicaments ». Certes, il est impératif de revaloriser les honoraires de dispensation dans l’immédiat, mais également de les corréler au coût de la vie, faute de quoi ils seront obsolètes à court terme. Les pharmaciens d’officine doivent investir en continu (personnel, équipement, formation…) pour ne pas disparaître, donc se projeter sur plusieurs années. La spirale actuelle de baisse de la rémunération et de flou artistique quant aux règles du jeu ne favorise en rien cette projection. Ce ne sont pas les nouvelles missions qui y remédieront de sitôt, ni la mesure (très positive cependant) permettant la dispensation d’antibiotiques sans ordonnance pour les angines et les cystites en cas de test positif - un dispositif déjà expérimenté de longue date et qui requiert une rémunération équivalant à celle d’une consultation médicale (test de dépistage inclus).
 
De façon plus générale, la question d’un acte pharmaceutique doit nécessairement être abordée lors des négociations. Un engagement de nos autorités sur ce point témoignerait véritablement de la reconnaissance prétendument accordée aux pharmaciens. La valeur moyenne de cet acte ne peut décemment se situer au-dessous de 15 euros, au regard du temps passé.
 
Oui, les pharmaciens demandent de la considération, pas d’être considérés comme un coût mais comme des partenaires durables. Ni comme des solutions de secours en cas de crise sanitaire, pour voir ensuite pointés du doigt leurs revenus exceptionnels, largement absorbés entretemps par les impôts, la hausse des charges, l’érosion des marges… Aux intentions doit succéder l’engagement de donner au réseau officinal le moyen de se maintenir et de développer ses missions dans l’intérêt de la population. Nous sommes déterminés à nous mobiliser si les réponses apportées ne sont pas à la hauteur des enjeux.

Vendredi 15 décembre 2023
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