1. Comment rendre la pharmacie d’officine plus attractive ?
On l’entend, on le lit partout : la pharmacie d’officine n’attire plus les jeunes et certains pharmaciens installés s’en détournent, écœurés par trop de difficultés. Notre métier est pourtant formidable et n’a jamais eu une aussi bonne image auprès des premiers intéressés : les patients !
Premièrement, il est vital de simplifier le quotidien des pharmaciens : désencombrer le métier du fatras de complexités administratives, faciliter notamment la gestion des indus et arrêter d’empiler toutes ces tâches qui transforment l’acte de soins en checkpoint de contrôle.
La formation ensuite, initiale et continue, doit impérativement intégrer la nouvelle donne des missions de santé publique, le management d’équipe centré sur le projet de santé, mais aussi le potentiel immense de l’intelligence artificielle pour simplifier les tâches et « augmenter » le conseil : plus personnalisé, plus proactif, plus préventif.
Il est enfin essentiel de communiquer sans relâche sur notre métier, que tout le monde croit connaître mais qui s’écrit dans une dynamique de renouveau.
2. Et si le renouveau venait justement de la pharmacie clinique ?
L’officine a connu trois périodes historiques, celle du pharmacien fabricant de médicaments, puis celle du dispensateur, lorsque l’industrie a pris en charge la production de l’essentiel des traitements. Celle enfin que nous connaissons aujourd’hui, du pharmacien à 100% professionnel de santé, dispensateur mais aussi prescripteur, acteur clé des soins de premier recours et partenaire de la longévité.
Il est intéressant de noter que cette nouvelle ère effectue la synthèse des précédentes, elle ne les annule pas. La préparation est remise à l’honneur, la dispensation toujours au cœur de notre activité, ces actions s’inscrivent simplement dans une légitimité plus large.
Il serait en revanche absurde de traduire ce virage clinique par un recours plus systématique à la prise de rendez-vous en officine, comme l’idée en a circulé, ce serait scier la branche sur laquelle nous sommes assis, car la force de notre profession tient beaucoup à son accessibilité. La dimension clinique du métier était déjà présente et s’amplifie, elle n’est pas là pour brouiller les repères des patients mais au contraire les renforcer, ancrer le « réflexe pharmacien » dans une continuité qui s’étend à l’ensemble du parcours de soins.
3. Pour tenir compte de ces transformations, comment la rémunération officinale devrait-elle évoluer ?
Naturellement, la profession ne pourra pas grandir sans une rémunération adaptée. C’est une question d’attractivité et d’équité, liée aux responsabilités accrues que nous ne cessons d’endosser. Le mode de rémunération actuel n’est plus adapté. Les tranches de TVA ne veulent plus rien dire de nos marges réelles, les baisses de prix incessantes, les changements de statuts de produits et les décisions réglementaires abruptes changent la situation de jour en jour. Les rémunérations parcellaires et les bricolages conventionnels ne suffisent plus. En tant que professionnel de santé et chef d’entreprise, le pharmacien doit pouvoir se projeter. Les hypothèses et les promesses ne paient ni les emprunts, ni les salaires de nos collaborateurs. À l’UNPF, nous estimons qu’il est nécessaire de définir la valeur plancher d’un acte pharmaceutique, qui ne peut pas être inférieure à 15 euros, hors inflation, et doit atteindre au minimum 25 euros lorsque l’équivalent d’une consultation est requis.
Cette rémunération doit s’inscrire dans une dynamique économique et géographique, avec des majorations d’honoraires comme dans les DROM pour les régions de métropole où la vie est plus chère. C’est une mesure de bon sens et qui contribuerait à enrayer l’hémorragie de compétences qui fragilise aujourd’hui le réseau.
À l’appui de cette évolution, il faut rendre visible la contribution majeure des pharmaciens à l’équilibre des comptes de santé, par la substitution générique et aujourd’hui biosimilaire, comme par la lutte contre l’inobservance et l’iatrogénie - maux responsables de milliards d’euros de surcoûts et de nombreuses complications et hospitalisations évitables. L’engagement dans les « nouvelles » missions et celles à venir comme le sevrage tabagique, prolongent cette logique vertueuse. Enfin, plutôt que de remettre sur la table des idées absurdes comme la dispensation à l’unité (ni écologique, ni économique, ni sûre), il urge de mettre en place un cadre juridique et financier pour ce pilier du bon usage que représente la préparation des doses à administrer (PDA), en permettant aux pharmaciens d’investir dans les équipements et compétences nécessaires à son développement.