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Promouvoir un exercice libéral et responsable

Quand la bureaucratie étouffe l’officine

Les journées n’ayant que 24 heures, « redonner du temps aux soignants » suppose de profonds changements. Star d’un récent sommet à Paris, l’intelligence artificielle (IA) permettra notamment d’automatiser de plus en plus de tâches administratives. Mais a-t-on pensé, dans le même temps, à réduire ces mêmes tâches qui parasitent le quotidien des professionnels de santé ?

Bien au contraire, la charge administrative ne cesse de s’alourdir. Et l’officine en est le douloureux témoin. Dernier exemple emblématique : la prescription renforcée pour les analogues du GLP-1. Ou comment imposer au médecin de produire un document justifiant sa prescription… et au pharmacien de jouer les contrôleurs. Cette mesure est théoriquement en vigueur depuis le 1er février avec une “période d’essai” de trois mois. Au 1er mai, faudra-t-il refuser la délivrance aux patients en cas d’absence ou d’incomplétude dudit document ? Prendre le risque d’une interruption de traitement ? Délivrer quand même, au risque d’un refus de remboursement ? Des questions pour l’heure sans réponse.

Des sueurs froides au comptoir
L’objectif de promouvoir le bon usage est légitime, mais la réponse, inadéquate, témoigne d’un déni de confiance envers l’expertise des médecins et des pharmaciens. Si des mesures spécifiques semblent nécessaires aux autorités pour sécuriser la prescription et la délivrance de médicaments à fort risque de mésusage, cela doit faire l’objet d’une concertation avec les premiers concernés, les professionnels de santé exposés à l’incompréhension et parfois à la violence des patients, comme l’actualité le montre. Et si un acte supplémentaire en résulte (un entretien par exemple), engageant la responsabilité et l’expertise du pharmacien, une rémunération dédiée doit alors être établie. Il devient insupportable que des décisions s’appliquent du jour au lendemain, alors qu’elles impactent le quotidien des libéraux de santé, leur temps, leur marge et leur crédibilité vis-à-vis des patients.

Si elle survit au boycott et à l’épreuve du terrain, la prescription renforcée pourrait être la goutte d’eau qui fera déborder le vase. Car de telles tracasseries, il y en a à la pelle, de la gestion des indus à sérialisation en passant par les dispositifs de lutte contre la fraude ou la remise d’une fiche d’information au patient lors de la dispensation de spécialités à base de pseudoéphédrine. Déjà, de nouvelles contraintes s’annoncent, notamment l’obligation d’ordonnance sécurisée pour le tramadol et la codéine à compter du 1er mars 2025 (comment ?), ou encore la volonté affirmée par la Cnam de conditionner le tiers payant à la présentation de la Carte Vitale pour certains médicaments (ceux à plus de 300 euros, ceux liés au diabète et ceux classés comme stupéfiants). Voilà qui laisse augurer des sueurs froides au comptoir. L’activité de pharmacien-gendarme va indubitablement se répercuter sur le temps de conseil et celui dévolu aux missions.

DAU, temps de gestion des ruptures…

Une autre menace pèse sur le temps pharmaceutique : le recours de plus en plus imposé à la dispensation à l’unité (récemment pour la quiétapine LP 50 mg dans un contexte de rupture), au prix d’une traçabilité manuelle d’un autre temps et sujette aux erreurs. Faut-il enfin rappeler que les officines consacrent 10h30 chaque semaine à gérer les ruptures, soit 4h de plus qu’en 2022, selon l’enquête 2024 du Groupement pharmaceutique de l'Union européenne (GPUE) ?

Le bon sens cartésien, censé être la chose du monde la mieux partagée, fait cruellement défaut à ceux qui veulent alourdir, toujours plus, la charge administrative des pharmaciens qui n’en peuvent plus. Les officinaux tiennent tant bien que mal leur poste avancé de santé, dans un système en crise, essayant de projeter leur équipe et leur entreprise officine vers un avenir économiquement viable et professionnellement stimulant. Tout en remboursant leur emprunt, ils s’efforcent de vivre de leur métier de santé. En dépit des formalités qui s’amoncellent, ils se forment en continu et innovent pour toujours mieux répondre aux besoins des patients. Vraiment, il est temps de laisser les pharmaciens respirer !

Vendredi 21 février 2025
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