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Promouvoir un exercice libéral et responsable

​Recrutement à l’officine : les situations qui coincent

Sur un marché de l’emploi toujours tendu, les titulaires s’efforcent de mobiliser les forces vives disponibles. À la pression économique et à celle des nouvelles tâches administratives s’ajoute la difficulté de trouver du personnel, non seulement qualifié pour chaque poste mais aussi « dans les clous » sur le plan réglementaire. À cet égard, le cadre rigide et pas toujours lisible ne facilite pas la donne et expose parfois les pharmaciens sans le savoir à un risque pénal. Décryptage avec Maître Sébastien Beaugendre, avocat au barreau de Paris, associé gérant du Cabinet Hubert Bensoussan & Associés.
 
Quels sont les blocages réglementaires actuels en France, empêchant un recours optimal aux forces vives disponibles pour travailler en officine ?
 
Maître Sébastien Beaugendre : Mes clients pharmaciens, comme toute la profession, déplorent une pénurie de personnels et estiment qu’un assouplissement ou une mise à jour de la réglementation pourrait faciliter l’embauche.
 
À titre d’exemple, j’ai récemment été confronté à une situation dans laquelle un pharmacien titulaire a embauché comme « employé en pharmacie » un ancien confrère qui n’était plus inscrit en Section A et qui, pour des raisons personnelles, ne voulait pas se réinscrire en Section D et désirait un travail à temps partiel d’employé.
 
Dans l’esprit de chacun, il va de soi que celui qui est titulaire d’un Doctorat en pharmacie peut, a fortiori, exercer des fonctions requérant des compétences moindres, telles qu’une fonction de préparateur en pharmacie. Mais cette situation n’est pas expressément envisagée par les textes qui régissent la profession de préparateur en pharmacie (cf. art. L 4241-10 et D 4241-1 du Code de la Santé Publique). Aucune disposition expresse ne vient énoncer que celui qui est titulaire d’un diplôme d’un degré supérieur (ici le doctorat en pharmacie) peut exercer la profession de préparateur en pharmacie.
 
Sans doute ce raisonnement de bon sens pourrait-t-il être celui d’un juge (disciplinaire et/ou pénal). En cas de procédure pénale, le juge aura à apprécier l’existence ou non d’un exercice illégal de la profession de préparateur en pharmacie par le pharmacien diplômé, et d’une complicité d’exercice illégal de la profession de préparateur en pharmacie par le pharmacien titulaire ayant embauché son ancien confrère.
 
Avez-vous d’autres exemples de situations de nature à créer des difficultés, ou à empêcher l’embauche par les officinaux de collaborateurs compétents ?
 
Me S. B. : Si un étudiant en pharmacie peut, à compter de sa troisième année, réaliser des remplacements, donc être employé dans une officine, cette situation requiert qu’il soit dûment inscrit à la Faculté de pharmacie. Mais quid d’un étudiant qui, par exemple au terme de sa 4ème année, décide de prendre « une année sabbatique », ne se réinscrit pas à la Faculté, part six mois à l’étranger et, de retour en France veut travailler dans une officine en attendant sa réinscription à la rentrée suivante ? L’intéressé dispose assurément des compétences requises pour y être employé. Mais sans inscription universitaire, le pharmacien titulaire se trouve empêché de l’embaucher.
 
De même, un pharmacien diplômé à l’étranger doit obtenir la reconnaissance de l’équivalence de son diplôme et son inscription à l’Ordre des Pharmaciens1. Si l’on comprend la logique, car un pharmacien doit disposer des compétences requises, il reste que cette situation ne lui permet pas d’être immédiatement embauché par une officine, par exemple dans un premier temps comme préparateur en pharmacie.
En poussant la logique jusqu’au bout, l’on en vient à penser que lorsqu’un titulaire embauche un pharmacien diplômé comme adjoint et que ce dernier a déposé un dossier d’inscription en Section D, il est dans une situation « précaire » pendant toute la période d’instruction de sa demande. Juridiquement, il n’est pas encore autorisé à exercer et ce n’est que lorsqu’il est inscrit que sa situation devient juridiquement sécurisée [1] .
 
Plus précisément, quels cas de figure requièrent selon vous une évolution législative urgente, et laquelle ? 
 
Me S. B. : Une des pistes pour assouplir et faciliter l’embauche de préparateurs en pharmacie par les officinaux consisterait à modifier l’article L 4241-4 du Code de la Santé afférentes à la profession de préparateur en pharmacie qui, en l’état, dispose : « Peut exercer la profession de préparateur en pharmacie et en porter le titre toute personne titulaire d'un diplôme, d'un certificat ou d'un titre délivré à la suite d'une formation lui ayant permis d'acquérir les compétences nécessaires à l'exercice de cette profession. Ces diplômes, ces certificats et ces titres sont définis par voie réglementaire. » (article L 4241 CSP)
 
Cette rédaction « fermée » renvoie à la liste des diplômes définis par l’article D 4241-1 du Code de la Santé Publique2, à savoir un DEUST « spécialité préparateur/technicien en pharmacie » et un « Brevet professionnel de préparateur en pharmacie ». Il pourrait y être ajouté un alinéa rédigé comme suit : « Toute personne justifiant avoir réalisé au moins trois années d’études en pharmacie lui ayant conféré le grade de Licence, bénéficie de plein droit d’une équivalence lui permettant l’exercice de la profession de préparateur en pharmacie ».
 
Autre disposition utile : insérer dans le dispositif légal et réglementaire une disposition selon laquelle tout Docteur en pharmacie, ou personne justifiant d’un diplôme équivalent, ayant déposé auprès du Conseil National de l’Ordre des Pharmaciens une demande d’inscription en qualité de Pharmacien Adjoint, peut, pendant l’instruction de son dossier, exercer cette profession à titre temporaire. »
 
Maître Sébastien BEAUGENDRE, Avocat au barreau de Paris, associé gérant du Cabinet HUBERT BENSOUSSAN & Associés, Maître de conférences des Facultés de Droit.
 
• Cet article fait-il écho à des situations que vous avez rencontrées ? N’hésitez à contacter l’UNPF pour partager votre expérience, alerter vos confrères ou demander conseil.
• En fonction de vos réponses, nous ne manquerons pas de revenir sur le sujet et au besoin d’interpeller les autorités concernées, en vue d’agir sur les problématiques identifiées.
 
Références :
1. https://www.ordre.pharmacien.fr/je-suis/pharmacien/pharmacien/mon-parcours-et-mes-demarches/exercer-en-france
2. Qui dispose : « Peut exercer la profession de préparateur en pharmacie et en porter le titre, en application de l'article L. 4241-4, toute personne titulaire des diplômes, certificats et titres suivants :
1° Diplôme d'études universitaires scientifiques et techniques, spécialité préparateur/technicien en pharmacie ;
2° Brevet professionnel de préparateur en pharmacie.
Les dispositions des articles D. 612-2 à D. 612-18, D. 613-1 et D. 613-6 du code de l'éducation s'appliquent au diplôme d'études universitaires scientifiques et techniques, spécialité préparateur/technicien en pharmacie.
Les dispositions des articles D. 337-95 à D. 337-124 du code de l'éducation s'appliquent au brevet professionnel de préparateur en pharmacie, sous réserve des dispositions de la présente section
 


 [sb1]Voir si une inscription est faite avec effet rétroactif au jour de la demande d’inscription.

Vendredi 26 septembre 2025
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